Au milieu des années 80, les voitures américaines se sont assagies par rapport aux modèles des décennies précédentes et les yuppies, ces jeunes cadres ayant rapidement gagné de fortes sommes d’argent, préfèrent se tourner vers les productions européennes. Dans ce contexte, Cadillac décide de développer un nouveau modèle visant à satisfaire les attentes de cette clientèle particulière, un cabriolet deux places, luxueux et cher.

Voulant concurrencer les productions européennes importées, la firme américaine, qui appartient à General Motors, va se tourner vers un carrossier italien, Pininfarina, pour dessiner le nouveau modèle, ce qui ne sera pas sans faire grincer des dents au bureau du style de la maison mère. Pininfarina présente donc un sympathique cabriolet présentant une face avant semblable à celle des Cadillac contemporaines et une ligne générale qui n’est pas sans rappeler celle de la Lancia Gamma Coupé….dessinée par le même Pininfarina ! Cette ressemblance est encore plus flagrante lorsque la nouvelle Cadillac est équipée de son hard-top. Sous le capot prend place un moteur V8 de 203 chevaux. Reste encore à trouver un nom pour la nouvelle venue. Si lors des premières réflexions sur le modèle le nom de Callisto sera évoqué, Cadillac souhaite un patronyme donnant une impression de vitesse. « Avanti » étant déjà pris par Studebaker (le coupé Avanti est encore produit par un repreneur au milieu des années 80, voir l’article sur la Studebaker Avanti sur A story about cars), ce sera donc Allanté, un nom qui ne veut strictement rien dire mais qui présente l’effet escompté.

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Cadillac Allanté, photographiée au musée The Autos Collections à Las Vegas, Photo : GME

Sous son apparence plutôt sobre et classique, le design de l’Allanté regorge de petits détails intéressants. A commencer par le troisième feu stop, implanté au milieu de la malle arrière à un endroit où l’on se serait davantage attendu à trouver le logo du constructeur. La trappe à essence se situe en position basse au niveau du passage de roue arrière gauche. Les clignotants forment les inscriptions « Cadillac » à gauche et « Allanté » à droite. Quant au tableau de bord, qui se voulait résolument à moderne à l’époque, il ressemble à un ordinateur (de l’époque…) et apparait délicieusement kitchissime aujourd’hui !

Mais la plus grande originalité de l’Allanté restera son procédé de fabrication. Le cabriolet est basé sur la plate-forme de la nouvelle Eldorado (traction avant donc…). Les plate-forme fabriquées à Detroit sont donc envoyées chez Pininfarina à Turin, où les châssis seront raccourcis de 22 cm et où la carrosserie sera fixée. Les Allanté sont ensuite renvoyées vers l’usine de Hamtrack dans le Michigan afin de recevoir leurs trains roulants. Et tout ça en avion pour gagner du temps ! General Motors avait développé un partenariat avec Alitalia et la Lufthansa pour convoyer les Allanté en cours de montage par les airs dans trois cargos 747 pouvant accueillir 56 véhicules. Ainsi, une Allanté vendue neuve en Europe aura déjà traversé l’Atlantique trois fois avant d’être livrée à son premier propriétaire !!

Inutile de préciser que ce complexe procédé de fabrication, surnommé « Allanté Air Bridge » ne sera pas sans effet sur le prix de vente de la voiture. Affichée à près de 55 000 dollars, l’Allanté est chère, très chère, aussi chère que ses concurrentes européennes qui doivent s’acquitter de taxes d’importation. Cadillac tablait sur des chiffres de ventes compris entre 6000 et 8000 exemplaires par an. Cela pouvait semblait ambitieux sachant qu’il se vendait chaque année moins de 4000 Porsche 928 ou Jaguar XJS sur le marché américain. Comme cela était prévisible, l’Allanté fut un échec commercial. Le fait d’équiper le modèle pour le millésime 1993 du fameux V8 Northstar de 265 chevaux n’a pas suffi à infléchir la courbe des ventes. Après 7 ans de commercialisation, entre 1987 et 1993, General Motors jette l’éponge. Pénalisée par son prix de vente et sa puissance un peu juste avant le Northstar, l’Allanté n’a pas su trouver son public malgré un charme indéniable et de solides qualités routières. Cadillac récidivera sur le marché des cabriolet deux places dans les années 2000 avec l’XLR. Cette dernière, pénalisée par une design clivant et là encore un prix de vente conséquent, n’aura pas beaucoup plus de succès que l’Allanté.

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Cadillac Allanté, Photo : GME

Au cinéma, on peut voir une Allanté grise conduite par Sylvester Stallone dans la scène d’ouverture de Tango et Cash, sorti en 1989. Un exemplaire noire de 1989 apparait également dans le clip 24K Magic de Bruno Mars.

L’Allanté fut vendue neuve en Europe, au même titre que les Séville et Eldorado, même si elle n’y a pas eu beaucoup plus de succès que dans son pays d’origine. Aujourd’hui, il est possible de trouver un très bel exemplaire pour moins de 20000 euros, mais il faudra peut-être aller le chercher chez nos voisins suisses, allemands ou belges, plus friands de ce type de véhicule.

A titre personnel, j’ai toujours aimé l’Allanté et son style typiquement eighties, même si je n’ai pas eu la chance d’en voir beaucoup. Je me rappelle principalement du superbe exemplaire qui illustre cet article, aperçu au musée automobile de Las Vegas. Est-ce que je la voudrais dans mon garage ? Comme unique voiture américaine, certainement pas, une Corvette ou une Mustang a quand même beaucoup plus de charme. Mais elle pourrait apporter une petite touche d’originalité au milieu d’une petite collection….